Passionnée d’images et de film, j’ai entâmé mon parcours de photographe très jeune. Originaire de Lyon, je suis partie étudier les arts visuels et médiatiques à l’Université du Québec à Montréal, dont je suis sortie diplômée en 2017. J’ai eu l’occasion pendant mes études de pratiquer la photographie argentique, numérique, les photogrammes… Ce qui me permet d’avoir une vision très large du médium, et de faire encore beaucoup d’essais.

Ma démarche artistique est basée sur l’étude du corps humain, les formes, les mouvements. En effet, à travers la photographie je questionne le corps et ses limites, ce qui m’a rapidement amené à la photographie de mode. Les vêtements donnent un caractère, un trait de personnalité que l’on peut modeler, modifier selon l’histoire racontée.

Je travaille le plus possible en extérieur car j’aime jouer avec les éléments na- turels, la terre, l’eau, le vent… La lumière vient aussi modeler mes modèles, et je m’adapte à elle au lieu de la diriger. Cependant, je profite d’être en intérieur pour faire du nu, et me concentrer sur les aspects parfois abstraits du corps humain, dont je tente de capturer la beauté.

S’ÉMANCIPER

Cette première série a été réalisée en studio à Montréal. C’est lors d’un voyage en Italie que j’ai eu l’idée de ce projet. En effet, mon inspiration première a été les statuts, que j’ai observé tout au long du voyage. Mon attention s’est portée sur le socle, présent partout. J’étais éblouie par ces femmes, souvent empri- sonnées dans leur drapé et figées dans le temps. La structure des sculptures donne l’impression que ces êtres sont coincés, qu’ils ne peuvent plus bouger.

S’émanciper raconte l’histoire d’une femme qui se sent étouffée par certains aspects de sa vie. Plusieurs éléments l’empêchent d’avancer. J’utilise le drap/ socle comme métaphore pour illustrer ces derniers. Peu à peu, elle s’éman- cipe, se développe et grandit. Je mélange l’humain et la sculpture en utilisant un grand drapé blanc, ainsi que les bijoux d’une designer montréalaise. Ceux- ci sont géométriques et viennent former un contraste avec l’aspect organique et ondulé du corps. Entre légèrté et pesanteur, les photos nous dévoilent les différentes étapes d’un processus d’épanouissement personnel.

Les premières photos comportent un peu plus d’éléments, on observe parfois les gestes de résistance, parfois l’acceptation. En gros plan, la sensation de se rapprocher des sentiments du modèle. La lumière douce et le fond uni nous permettent de nous concentrer sur le corps, et ses réactions face à la vie.

SELF-ISOLATION

En rentrant de voyage, le Canada impose une quatorzaine à cause de la pandé- mie mondiale. J’ai donc vécu une nouvelle fois l’isolement. Mais cette fois-ci, je l’ai documenté en images, pour analyser les différents ressentis que j’ai pu avoir.

Cette série est entièrement en autoportrait. C’est une pratique délicate pour gérer les aspects techniques, mais je me sers justement de cette contrainte pour raconter la réalité telle quelle. J’ai choisi de me positionner devant ma porte d’entrée d’appartement, car c’est souvent vers elle que je tourne le regard pendant l’isolation. C’est un symbole de liberté.

L’usage du noir et blanc résume la grisalle de l’esprit lorsqu’on est seul et sans activité. Je me suis mise en scène pour tenter d’illustrer les différents états d’esprit qui m’habitaient. Nous pouvons observer d’abord des portraits, qui me présentent en tant que personne, dans la plus grande intimité de mon logement. Ensuite, les photos illustrent l’attente et même parfois la folie, qui m’a gagné de temps en temps. J’ai tenté de m’habiller, pour garder le rythme de la vraie vie. Je me suis dénudé, souvent. J’ai aussi utilisé mes drapés, très récurrents dans mon travail.

Ces moments de solitude permettent toutefois une introspection profonde, et j’en suis très reconnaissante. Cette série représente l’attente, la nostalgie, la solitude, la réflexion ou encore la personnalité par la mise en scène de soi.