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Reconstruire les combles des cathédrales, une commande photographique patrimoniale

Cathédrale Saint-Étienne de Cahors, comble du beffroi, vue en contre-plongée de la charpente de la passerelle sud
© Patrick Tourneboeuf /Tendance Floue / Ministère de la Culture / Centre des monuments nationaux / Médiathèque du patrimoine et de la photographie

Après avoir été présentée à la cathédrale de Fréjus, la restitution d’une commande photographique confiée à huit photographes est désormais accueillie à la Conciergerie de Paris. Consacrée aux charpentes et aux combles des cathédrales appartenant à l’État, cette exposition vise à en préserver la mémoire et à en assurer la conservation. Intitulée Reconstruire les combles des cathédrales, elle est placée sous le commissariat de Françoise Paviot.


Type de fabrication : Impressions directes sur support rigides (dibond).
Le laboratoire Picto aide les photographes professionnels pour la réalisation de leurs expositions, des tirages à l’accrochage, en passant par les finitions et l’encadrement.


La photographie, mémoire et conservation du patrimoine

Quand en 2023 le Centre des monuments nationaux (CMN) organise, à la demande du ministère de la Culture et en lien avec la Médiathèque du patrimoine et de la photographie (MPP), une campagne photographique sur les combles des cathédrales, il renoue avec l’esprit de la première commande passée par une administration à des photographes en 1851 : la Mission héliographique. À la suite de la Révolution française apparait la notion de patrimoine et la nécessité d’en préserver la mémoire. La photographie qui avait vu officiellement le jour en 1839 va vite être considérée comme inégalée pour reproduire la réalité. C’est pourquoi la toute jeune Commission des monuments historiques organise un recensement photographique des principaux monuments français avant leur restauration. C’est ainsi que la photographie d’architecture fait son apparition et se substitue aux recueils de dessin.

Après l’incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris, des mesures ont été décidées pour renforcer la sécurité des 87 cathédrales propriétés de l’État, dont celle du cloisonnement des combles pour permettre de mieux maitriser les incendies. On peut définir un comble comme la construction qui surmonte un édifice et en supporte le toit. Ces travaux, dont certains avaient déjà commencé, allaient cependant modifier l’espace dans son état initial, d’où est apparue la nécessité d’en conserver la mémoire. À la suite d’une consultation, huit photographes ont été sélectionnés et chargés chacun des cathédrales situées dans la région qui leur avait été confiée (2). Pour préserver au mieux l’exactitude documentaire de ce dernier témoignage visuel avant transformation, des axes de prise de vue bien précis ont été demandés mais liberté aussi a été laissée aux photographes de faire des images de leur choix. À bien y regarder, les deux points de vue ne sont pas si éloignés : réaliser des documents, aussi objectifs soient-ils, reste toujours le fruit d’une construction.

Des photographes à l’œuvre

Les huit photographes qui ont été choisis pour travailler dans les combles des cathédrales sont des professionnels, familiers des travaux de commande, et plus particulièrement dans le domaine du patrimoine et de l’architecture. Ils collaborent ou travaillent régulièrement avec des institutions dont on ne connait pas toujours les actions et les richesses documentaires. Tous ont ressenti comme un privilège de pouvoir pénétrer dans des lieux quasiment secrets et à être les derniers à les voir dans toute leur intégrité. Entrer, souvent seul, dans des espaces plongés dans la pénombre, poussiéreux et silencieux s’est révélé une expérience impressionnante. C’était comme pénétrer dans le ventre de la baleine dira l’un d’entre eux.

Une seule journée de travail était prévue par cathédrale et il a fallu très vite passer à l’action. Se déplacer dans l’espace a souvent tenu de l’exploit sportif, repérer avec exactitude les axes de prise de vue demandés n’a pas été sans mal. Tous ont travaillé avec des appareils numériques mais de grand format, placés sur un pied en raison des temps de pause de plusieurs secondes à quelques minutes pour pallier l’absence parfois totale de lumière. Chacun a eu sa méthode pour éclairer les lieux : des leds ou des lampes torche utilisées comme des pinceaux pour balayer les zones d’ombre. Les grandes vues en perspectives sont devenues la précieuse mémoire des espaces, les plans rapprochés ont transformé l’enchevêtrement des charpentes en abstractions géométriques, les vues en plongée ou en contreplongée ont révélé le savoir-faire de la main des bâtisseurs. Il fallait rester fidèle à la commande, mais chacun a su apporter à la pertinence documentaire de son appareil l’intelligence de son regard.

– Texte de Françoise Paviot, commissaire de l’exposition


• Date : Du 20 septembre au 2 novembre 2025
• Lieu : Conciergerie
2 Bd du Palais
75001 Paris
https://www.paris-conciergerie.fr/