Hangar dévoile un projet inédit de Sylvie Bonnot à Paris Photo

Avant d’accueillir dans ses murs à Bruxelles l’exposition consacrée à la photographe plasticienne Sylvie Bonnot, membre du collectif Tendance Floue, Hangar dévoile en avant-première sa nouvelle série “Le Royaume des moustiques”, dans un solo show à l’occasion de la 28ème édition de Paris Photo. Ce projet inédit interroge le partage des ressources entre les règnes animal et végétal, ainsi que les transformations du paysage amazonien de Guyane. À découvrir au stand M03, dans le secteur Emergence.
Type de fabrication : Tirage d’exposition.
Le laboratoire Picto aide les photographes professionnels pour la réalisation de leurs expositions, des tirages à l’accrochage, en passant par les finitions et l’encadrement.
La lisière est le thêatre du Royaume des moustiques. C’est une recherche en cours qui explore notre lien fragile au vivant et à l’image photographique à travers les récits complexes, poignants et parfois paradoxaux de l’Amazonie en Guyane. Au croisement de la photographie argentique, d’une approche performative du paysage, des sujets et de l’image, ce rhizome photographique trame des fragments de récits invisibilisés, des formes précaires, les tensions entre mémoire, déracinement et coexistence avec les autres règnes (Tim Ingold) dans le soulèvement cristallisé des images.
À contre-courant d’une vision passée de la forêt dite « primaire » ou « vierge », cette recherche met en lumière des récits de cohabitation, d’adaptation, de résilience. Elle s’ancre dans la réalité des communautés comme les Hmongs ou les Cotticas, qui incarnent aujourd’hui des cosmogonies singulières. Leur ré-enracinement en lisière de forêt amazonienne nous éclaire sur les grands enjeux contemporains : crise environnementale, habitabilité de la planète, partage des ressources à l’appui de mon procédé de la « mue », un geste photographique et plasticien que j’ai inventé.
Soulèvements des images
Le corpus d’environ 60 « mues » réparties en 30 diptyques prend sa première forme avec la série Soulèvements, amorcée à la Cité Internationale des Arts (Paris, 2025), dont les grands formats Berceau de Moïse et Ivanaïssa. Ces photographies cristallisées sont mises en regard par des diptyques pour proposer une autre lecture des liens entre règnes humain, végétal et animal, par fragments rapprochés, enchevêtrés, en écho à l’hybridité actuelle des mondes et de l’image.
Le procédé de la mue résulte de mon approche performative du sujet, du paysage et de l’image.
La matière argentique devient vivante avec ce geste plasticien qui fait frissonner la matière et qui traduit l’intention derrière l’image : parfois une plasticité marquée pour les sujets végétaux ou bien la plus grande délicatesse pour les portraits. Ces derniers sont un genre inédit dans mes recherches. Ce nouveau registre d’image a conduit à une profonde remise en question de mon regard : déjà sur place en Guyane entourée des personnes concernées, puis d’Alain Willaume à la Cité des arts. J’ai cherché une forme de justesse dans la façon de mettre en lumière celles et ceux qui habitent mes images, par respect pour l’autre, pour la complexité des récits qu’ils incarnent et qui nous lient par l’histoire.
Les limites physiques de l’épreuve photographique tendent vers une mise en abime et un épuisement de la matière argentique, en écho à celui des corps et des sols d’Amazonie. Ces juxtapositions rapprochent des regards, des fragments de vies, des gestes, des lianes, des oiseaux. Elles captent des pratiques culturales déracinées qui se croisent et se rejouent dans les plis de l’histoire. Le diptyque permet un équilibre délicat avec les paradoxes et les dichotomies qui ponctuent les récits de celles et ceux qui vivent là au plus prés du royaume du vivant: la forêt et dans la stratigraphie du paysage amazonien de Guyane.

Réalisées à la Cité Internationale des Arts, Paris, 2025.
Accompagnement d’Alain Willaume dans le cadre du programme “Elles & Cité”
Archéologie et futurs
En 2024, la résidence photographique de l’ECPAD X ADAGP a été l’occasion d’une plongée dans les méandres des archives relatives aux réfugiés, notamment Hmongs et Cotticas révélant un fil conducteur : le drapé – des abris d’urgence, toiles, baluchons, paysages. Ces éléments sont devenus les plis du paysage et de l’histoire à ouvrir : une mise en abime de la matière à partir des membranes d’Adhex (résidence Artiste en entreprise, Adhex x Interface, 2024).
Début 2025 en Guyane et au Suriname, la résidence MAZ X La Station Culturelle a conduit à de nouvelles images résultant de la rencontre avec les communautés ré-enracinées en lisière d’Amazonie.
La série Soulèvements se compose actuellement d’environ 30 diptyques photographiques (36 × 51 cm et 72 x 51 cm), et de grands formats (165 × 115 cm). Une sélection de ces oeuvres inédites fera l’objet du solo show Paris Photo X Hangar Gallery au Grand Palais en novembre prochain à la suite de la résidence Elles & Cité, à la Cité Internationale des Arts, Paris au printemps 2025.
Les récits complexes de Guyane nous rappellent l’histoire qui nous lient, ils se superposent parfois tragiquement et s’interpénètrent, à l’image des sous-étages de la canopée. Les lianes, les personnes, les chamans et les oiseaux constituent la dorsale du projet. Ils tissent des échos visuels, symboliques, cosmogoniques dans une Amazonie au coeur des enjeux écologiques et politiques, mais aussi porteurs d’un message pour les sociétés occidentales : la nécessité de la coexistence.
Le coeur du Royaume des moustiques est là : dans les regards croisés, les liens fragiles entre formes du vivant, matière photosensible, et gestes photographiques. C’est un fleuve au long cours, ponctué de l’archipel des structures (institutions, collectifs, communautés) qui en sont à la fois les piliers et les relais.
Sylvie Bonnot
• Date : De 13 au 16 novembre 2025
• Lieu : Grand Palais
17 avenue du Général Eisenhower
75008 Paris
https://hangargallery.be


